Salarié absent pour cause de maladie – mode d’emploi

Toute employeur est confronté à l’absence des salariés pour cause de maladie. Cet article a pour objet la présentation succincte des règles applicables en droit du travail au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation, notamment de l’arrêt en date du 12 octobre 2011 (n°10-16649).

1) Sur la situation générale du salarié absent pour cause de maladie :

Lorsqu’un salarié se trouve dans l’incapacité de travailler pour cause de maladie, son contrat de travail se trouve suspendu, ainsi que la plupart des obligations contractuelles découlant de son contrat de travail.

Toutefois, certaines obligations perdurent, notamment l’obligation de loyauté du salarié envers son employeur (c’est-à-dire l’interdiction pour le salarié d’adopter un comportement ou de réaliser une activité préjudiciable envers la société).

De plus, dans des conditions extrêmement variables selon son ancienneté ou sa catégorie professionnelle, le salarié bénéficie d’un maintien partiel de sa rémunération.

2) Sur la possibilité pour l’employeur d’organiser une contre-visite médicale :

L’article L1226-1 du Code du travail[1], dispose que tout salarié, sous certaines conditions, ayant un an d’ancienneté en cas d’absence du travail justifiée, a le droit au versement d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière.

Ainsi, et uniquement si l’employeur verse une indemnité complémentaire à son salarié malade, le salarié pourra être soumis à une contre-visite médicale qui est encadrée par certaines conditions strictes.

Cette contre-visite ne peut être effectuée qu’à compter du premier jour de la maladie et l’employeur est en principe libre de choisir le médecin contrôleur.

Les effets de cette contre-visite sont toutefois limités.

En effet, en cas de refus pour le salarié de se soumettre à la contre-visite ou si le médecin contrôleur conclu que le salarié peut travailler (Cass. Soc.9 juin 1993, n° 90-42701 ; Cass. soc. 14 juin 1995, n° 91-44831), l’employeur sera seulement autorisé à suspendre pour l’avenir le versement des indemnités complémentaires.

Ainsi, en aucun cas le résultat de la contre-visite médicale ne peut servir de justification pour licencier le salarié (cass. soc. 10 novembre 1998, n° 96-42969 ; cass. soc. 27 juin 2000, n° 98-40952).

3) Sur la possibilité pour la CPAM d’organiser une contre visite médicale :

A noter, la CPAM peut également réaliser un contrôle médical du salarié. Toutefois, L’employeur ne peut imposer à cet organisme de contrôler le salarié, la CPAM restant la seule personne à décider de l’opportunité d’un contrôle.

Enfin, il convient de bien distinguer les obligations du salarié envers son employeur et les obligations du salarié envers la sécurité sociale.

En effet, la sécurité sociale peut aisément supprimer les indemnités journalières dès lors que le salarié ne respecte pas les termes de son arrêt maladie (Cass. 2e civ. 9 décembre 2010 n°09-17449). Par contre, il est de jurisprudence constante qu’un salarié étant en infraction avec la sécurité sociale, ne peut être licencié par l’employeur pour ce motif, car les rapports entre la sécurité sociale et le salarié sont distincts de ceux entre le salarié et l’employeur (par exemple : Cass. soc. 16 juin 1998, n° 96-41558).

4) Sur la possibilité de licencier pour faute un salarié absent pour cause de maladie :

Durant un arrêt maladie, bien que le contrat de travail se trouve suspendu, certaines obligations perdurent notamment l’obligation de loyauté du salarié envers son employeur.

Ainsi, il est possible de licencier un salarié pour faute si l’on établit qu’il a manqué à son obligation de loyauté durant son arrêt de travail.

Traditionnellement, dès lors que le salarié exerçait une activité lucrative durant son arrêt de travail, le licenciement pour faute était justifié, puisque ce fait constituait un manquement à l’obligation de loyauté du salarié. Seules les activités bénévoles étaient tolérées par la jurisprudence.

Toutefois, depuis un arrêt de principe du 12 octobre 2011 (n°10-16649) rendu par la Cour de cassation, l’employeur ne peut licencier un salarié qui a exercé une activité durant son arrêt maladie que si cette activité a porté préjudice à l’employeur.

Ainsi, il conviendra de démontrer l’existence dudit préjudice afin d’établir la violation de l’obligation de loyauté.

Le préjudice sera caractérisé dans l’hypothèse où le salarié exerce durant son arrêt maladie un emploi rémunéré dans une activité concurrente à celle de l’employeur.

La seule possibilité dans cette hypothèse (acte de concurrence commis pendant son arrêt maladie), reste de solliciter le président du tribunal par requête afin que ce dernier autorise la nomination d’un huissier qui pourra constater que le salarié exerce durant son arrêt maladie une activité concurrente à celle de l’employeur.

Seule cette méthode de preuve sera recevable devant le Conseil de Prud’hommes (Cass. Soc 19 janvier 2005. 02-44.082 ; Cass. Soc. 6 décembre 2007, n° 06-43392).

Ce n’est que suite à l’obtention du rapport de l’huissier qu’il sera possible d’engager une procédure de licenciement pour faute, justifiée par la violation par le salarié de son obligation de loyauté.

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[1] « Tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, à condition :

1° D’avoir justifié dans les quarante-huit heures de cette incapacité ;

2° D’être pris en charge par la sécurité sociale ;

3° D’être soigné sur le territoire français ou dans l’un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l’un des autres Etats partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

Ces dispositions ne s’appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires. »

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